Une rencontre fortuite...

‘Le centre-ville… Pas de bol ! Comment lui dire ?’
Alice ne répondait qu’à moitié. Pour son âge, elle était bien évasive…
Et peut-être un peu cyclothymique ! Encore un nouveau revirement.

- « Ne t’inquiète pas. Je reviens tout de suite. Attendez-moi là. »

Wolf courut en direction du parking et disparut dans le noir. Aussi vite que possible, il se mit à la recherche du corps d’un motard, ou à défaut d’un policier surpris à son volant.
Il retira des décombres ce dont il pourrait avoir besoin : un blouson pour Alice, une paire de gants pour lui-même, et deux Maglite pour progresser dans les rues assombries.
Aussi, il retira les chargeurs de toutes les armes qu’il put trouver. Ceux qui passeraient après lui ne pourraient s’approvisionner ici !
Mais toujours pas de paquet de clopes… ‘Quelle guigne !’
Et retournant vers l’ambulance du même pas, il tendit le vêtement trop large à la petite ; et une des lampes torche à Luka.

- « Quand tu veux ! … Si t’es vraiment certain de vouloir y aller maintenant. »

Si cela n’avait tenu qu’à lui, Wolf aurait passé la nuit là ; et soumit le commissariat à une fouille beaucoup plus systématique. Mais l’inspecteur semblait prêt à traverser la ville de nuit, prêt à sautiller une montre à la main vers un mystérieux rendez-vous…

Lorsque Luka prononca l'hospital, il sentit Alice porter sur lui un regard froid. Il se sentit soudain mal à l'aise.

Qu'est ce que j'ai dit?

Alice se leva et se dirigea vers Wolf. Luka resta muet, mais au moins, ils semblaient avoir brisé la glace.

[- « Ne t’inquiète pas. Je reviens tout de suite. Attendez-moi là. »]

Wolf se dirigea vers le parking qu'ils venaient de quitter. Luka et Alice restèrent là, sans s'échanger un mot. Il ne savait pas ce qu'il pouvait dire en de pareil moment. La nuit ne tarderait pas à étendre son voile sombre, et Luka ne savait toujours pas si l'éclairage des rues n'était pas endommagé. Si il ne s'allumait pas, que ferait-il? il ne pouvait emmener la petite fille à travers une ville plongée dans le noir, et encore plus quand on ignore les causes de la catastrophe. Il demanderait à Wolf de rester avec elle, il devrait y aller seul. Ils ne pouvaient cesser de penser à eux. Il était plus que déterminer. D'abord l'hospital, ensuite l'école.

[- « Quand tu veux ! … Si t’es vraiment certain de vouloir y aller maintenant. »] dit Wolf en tendant une veste à Alice et une lampe torche à Luka.

- Bien sur que j'y vais, mais je ne peux vous obliger à venir. On ne sait pas si l'éclairage des rues fonctionnent encore, et pire, on ne sait toujours pas ce qui s'est passé ici. Ca peut être dangereux.

Attends moi, j'arrive

Cassie s'emmitoufla dans le blouson, si elle avait été furax de voir le vieux pirate la délaisser, elle s'était adouci par l'intention. Il était certes trop grand, pour cela Wolfy n'avait pas le bon oeil, mais il tenait bien chaud ce qui la rendait moins boudeuse.

Ce qui ne dura pas longtemps lorsque Luka fit le mufle.

Tu parles qu'il ne veut pas nous obliger ! Peut-être que Wolfy peut se débrouiller tout seul mais moi hein ? Où me réfugier ? Comment lutter contre ce qui a fait ce carnage ? Que faire si elle tombait sur des méchants plus vilains qu'eux ? Il avait pensé à ça dans sa petite tête le brillant Môssieur ? Grrrr !

Son estomac se mit à gargouiller bruyamment criant famine alors qu'elle fulminait imaginant sous ses yeux rageurs un délicieux lapin au vin blanc comme cuisinait sa maman.

- Pour l’éclairage public, je doute qu’il fonctionne encore. D’où l’intérêt des lampes. D’ici une heure tout au plus, il fera nuit. On y verra moins que dans le tr… »

Il se souvint in extremis de la présence d’une enfant.

- « … que dans un four. Bon, écoutez, il vaudrait mieux rester groupés. Pour l’instant, gagner le centre-ville est trop risqué. Et inutile… Le mieux, c’est de gagner la périphérie, où les secours vont se concentrer. Enfin, normalement.
On devrait passer par les faubourgs de Hope Town. Ils avaient l’air moins atteints, d’après ce qu’on a vu. S’il y a des gens, ou des choses à récupérer, on aura plus de chance par là. Non ?
Alors, cap au sud-ouest ? »

Il les regarda tour à tour d’un air interrogateur. A vrai dire, plus pour calmer les esprits fatigués, que pour susciter un long débat. Un temps, il avait eu l’habitude d’être obéi, puis il avait du décider pour lui-même pendant des années de cavale. Et voilà qu’il se retrouvait avec une enfant sur les bras. Il s’attendait à tout, sauf à ça…

- « Ah, un dernier truc. Alice, tu as besoin d’autre chose ? Tu suivais un traitement ? Des médicaments ? »

- Heu... non, non. Je vais bien, je retournai à la maison, enfin chez mon amie... Sud-ouest c'est où ?

Loin de l'hôpital ? Cassie l'espérait fiévreusement et le regardait les yeux plein d'espoir, si c'était le cas elle devrait faire un bisou à Wolfy pour la sortir de ce guêpier. Il était agaçant à poser toujours plein de questions embarrassantes mais il avait l'air d'être le plus apte à se débrouiller. S'il était le capitaine Crochet elle pourrait être Mouche et l'aider tout à apprenant à se débrouiller elle-même comme une grande.

Wolf désigna un point dans le couchant, en fonction de ce qu’ils avaient pu observer sur le toit.

- « Par là. Plus loin… Juste un conseil ; évite de trop regarder autour de toi. C’est pas joli, joli. Regarde plutôt où tu mets les pieds… enfin, tes bandelettes. »

Il chercha dans les yeux de Luka le signe d’un assentiment muet. Alors il mit sur son dos le sac alourdi d’équipement.

Un instant, il crut entendre le bruit distant d’un moteur. Comme une pétarade lointaine apportée par le vent. Et puis plus rien. De nouveau ce silence accablant ; troublé par les seuls craquements d’agonie de sites familiers. Aujourd’hui empuantis des relents de la mort...
Défigurées, les échoppes d’antan avaient troqué leur accorte devanture pour un linceul grimaçant !
Le capitaine prit la tête de cette troupe sur le chemin de l’enfer. On le dit pavé de verre et bordé d’arbres d’acier... Quel Orphée avait donc entrevu notre belle cité ? Combien de sang fallait-il y verser ?
Et de fait, le ciel rougeoyant coulait sur la ville de toutes ses blessures. Un fusil sur l’épaule, Wolf piqua droit vers le soleil mourant.

- « En route ! »



1er octobre - 19h00 - [ vers Les rues ]