Une rencontre fortuite...

Dans le commissariat, la lumière rasante de cette fin de journée couvre les murs de couleur rouge... A moins qu'ils ne soient déjà recouverts par celui des crânes écrasés et des membres désarticulés...

Dans ce décor flamboyant, deux âmes ont survécue...
Wolf Blixen, récemment incarcéré pour on ne sait quelle raison et Luka Ever, jeune inspecteur de police.

Les murs de la cellule de Wolf ont cédé à cause de la catastrophe, lui offrant une possibilité d'évasion. Luka, quant à lui, a miraculeusement survécu et découvre avec horreur les corps disloqués de ses collègues.

Les voilà dans un lieu qui ne manque ni de ressources, ni de cadavres.

Luka était couché sur le sol. Dans un mouvement brusque, il ouvrit les yeux. Un bruit sourd faisait encore bourdonner ses oreilles.
Depuis combien de temps était-il inconscient ? Il n’en avait aucune idée.
Luka se releva, soulevant son corps comme un poids sans vie. Essoufflé et à bout de force, il ne comprenait plus rien. Il balaya son bureau du regard, découvrant ainsi le désordre qui semblait régné en maître dans la pièce. Tentant de reprendre ses esprits, il essayait de se remémorer ce qui avait bien pu arriver. Mais rien, aucun souvenir ne lui revenait. Pourquoi ?
D’un mouvement las, il s’approcha de la fenêtre. L’horreur qu’il y découvrit était pire que dans ses plus sombres cauchemars. Le chaos et la désolation avait envahit les rues de la ville. Des corps jonchant le sol côtoyaient les bâtiments en ruines. Lorsqu’il posa ses yeux sur l’horizon rougeoyant, ses derniers souvenirs lui revinrent en mémoire : son arrivé au bureau, le rapport qu’il rédigeait et cette obscurité soudaine. Une éclipse solaire, rarissime et magnifique. La dernière chose dont il se souvient, c’est le voile sombre qui s’abattit sur la ville. Et après, plus rien.

Maintenant qu’il avait retrouvé plus de force, il sortit de son bureau. La dévastation s’était répandu à tout ce qui se trouvait dans la ville, saccageant jusqu’au moindre petit coin. Le commissariat avait les traits d’un décor de film d’horreur. Luka s’engagea dans le couloir, n’ayant plus qu’une idée en tête : aidé les survivants, comprendre ce qui avait pu se passer et surtout, retrouvé sa femme et ses enfants.

‘Il m’en souvient encore de ce rêve d’enfance…’

Lorsque la netteté des images n’a plus rien de cette nébulosité propre au monde onirique, lorsque sa présence en d’autres lieux ne paraît que trop vraie, l’esprit humain - frappé de cette incongruité - préfère vous arracher au sommeil visionnaire ; de peur que la frontière ne finisse par s’estomper.
L’ubiquité est un piège si doux ! Surtout si de tels épisodes se déroulent en d’autres temps… Nul ne peut les oublier. Et quand bien même on le voudrait, ils sauront se manifester de nouveau, le moment venu.
Pour Wolf Blixen, le moment était venu.

Tout embrumé d’une nuit provoquée, il rassemblait ces vieux fragments de rêve, aujourd’hui d’une douloureuse actualité :
La grande salle de contrôle peuplée de blouses blanches. La vaste baie vitrée devant laquelle il vient se placer. Puis ce vent si puissant qu’il emporte les arbres même. Suivi d’un terrible grondement, capable de liquéfier les cœurs les plus vaillants. Enfin, comme attendue, l' éblouissante lumière qui recouvre le monde et met fin à tout !
Longtemps il s’était demandé pourquoi ce qui ressemblait à une explosion atomique se déroulait à l’envers. A présent, une esquisse de réponse prenait forme dans son cerveau engourdi. Et si cela avait été le signe annonciateur d’un temps à venir ? La marque étrange de l’observation du futur ?
Parce qu’au sortir de l’inconscience, il se remémorait déjà les évènements plus récents…

Non, il n’était pas dans son lit douillet. Et ce qui pesait sur lui n’était pas sa couette préférée. Mais une planche plus épaisse que le matelas qu’elle portait. Au moins avaient-ils amorti la chute du pan de mur, qui l’oppressait maintenant.
Wolf ouvrit l’œil. Un instant, il frémit ! Il ne voyait plus rien…
Dès que l’intolérable lueur avait frappé les barreaux de son étroite fenêtre, presque une meurtrière, il avait plongé sous la couche sommaire que le gouvernement lui offrait. Le vieux guerrier avait l’instinct de ces choses. Une telle luminosité ne pouvait être suivie que d’un souffle meurtrier.
Malgré tout, il avait encore, comme imprimées sur la rétine, les couleurs de l’arc-en-ciel, se livrant à la danse des sept voiles. Dans son crâne, les lueurs diffractées rebondissaient du cristallin à son œil de verre, en autant de feux follets…
Une fois passé, il s’ouvrit à la réalité.

Et dire qu’une minute auparavant, il ruminait de sombres plans de vengeance, contre ceux qui l’avaient incarcéré. S’il les rencontrait…
Dans ses accès de rage et de frustration les plus noirs, il avait envisagé de précipiter cet Etat indigne dans un total chaos des plus jubilatoires.
Le Ciel l’avait exaucé ! Le Ciel ? Voire…
Jamais Wolf n’avait souhaité un tel désastre – s’il pressentait bien la situation.
Curieusement, il lui en voulait encore, au gouvernement. D’être responsable, ou de ne pas avoir su l’empêcher…
‘Alors ça y est ! Ils ont fini par la faire péter.’
Sans qu’il sache vraiment qui était ce ‘ils’.
Au fond, là, il en voulait à l’humanité toute entière, d’être aussi conne !
Et puis, il se souvint que l’explosion avait été précédée d’une éclipse. La part rationnelle en lui criait à l’attentat fondamentaliste. Mais son autre part lui laissait entrevoir des schémas plus machiavéliques encore…
Il avait bien le temps d’échafauder des théories. Dans l’immédiat, cela lui offrait une opportunité de s’échapper – si possible.
‘A tout malheur quelque chose est bon…’, pensa-t-il en soupirant.

Il se risqua enfin à remuer les doigts et les orteils. Il contracta chaque membre ankylosé, un à un. Apparemment, rien de cassé. Mais il avait un goût de plâtre dans la bouche ; et il était bel et bien coincé sous un amoncellement de briques.
Il banda tous ses muscles endoloris, pour une poussée libératrice… La fameuse bandaison du réveil ! Il repoussa la planche et les gravas loin de lui, dans un nuage de poussière.
La cellule dévastée présentait une nouvelle sortie. Le mur mitoyen n’avait pas résisté à la violente projection d’un distributeur de boissons. Quelques canettes jonchaient le sol.
Wolf se saisit d’un coca, et lorsque la mousse eut fini de lui saloper les bottes, il vida le reste d’un trait.
‘Trop tiède… Je vomis les tièdes ! – Comme dirait l’autre…’
Mais il avait besoin de sucre. Il en empocha quelques unes dans son treillis. D’habitude, il y mettait plutôt des munitions, mais vu les circonstances… On l’avait privé de ses petits porte-bonheur.

Pas un bruit. Soit les flics étaient trop occupés à se dégager eux-mêmes des débris. Soit ils étaient partis acheter une nouvelle machine à café… What else ?
Wolf enjamba le distributeur pour se faufiler dans l’ouverture inattendue.
Il jeta un regard alentour. Première chose : trouver une arme…

Ses gardiens gisaient là sans connaissance. L’onde de choc avait ravagé la salle et les autres cellules. Wolf s’approcha de chacun d’eux, apposant trois doigts sur l’artère carotide… Plus de pouls pour ces deux malheureux. Il n’y avait plus rien à faire pour eux.
Il ferma les yeux écarquillés de ces gamins qui, la veille encore, le poussaient dans sa cellule avec une crainte à peine dissimulée. Puis il s’empara de leur arme de service, un simple manhurin réglementaire. En attendant mieux…
Wolf en passa un à sa ceinture et retira le cran de sécurité du second. Paré à toute éventualité.
Enfin, il prit le trousseau de clefs dont le jeune brigadier n’aurait plus utilité, et entreprit une inspection rapide des autres cellules.
Hélas, le sort n’avait pas été plus clément avec ses codétenus. Quand ils n’avaient pas souffert de structures abattues, on les eût dit victimes d’une vague de feu !
Inutile de traîner ici plus longtemps.

Wolf remonta lentement les escaliers vers le grand hall, son arme dissimulée derrière lui. Histoire de ne pas déclencher une fusillade par trop inégale, s’il tombait nez à nez avec les commandos qui l’avaient capturé ! Mais il n’entendait pas y retourner, surtout dans ce contexte apocalyptique… La liberté l’attendait.

Toujours aucun son ne lui parvenait. Ils n’étaient quand même pas tous morts !
Le soldat aguerri fit appel à toute sa science de la furtivité, et s’engouffra sous les voûtes romaines de l’édifice déserté. Il passait de colonne en colonne, glissant à pas de loup sur le marbre souillé…
Soudain, un bruissement lointain lui fit dresser l’oreille. Il n’était plus seul !
Se renfonçant dans l’ombre, il attendait.

Personne. Le couloir vitré était complètement vide. Lui qui avant était bondé de monde il doit y avoir encore quelques heures.

Mais qu’est-ce qui a bien pu se passer, où est passé tout le monde.

Luka avançait en direction du bureau du capitaine, observant chaque détail qui pouvait sortir de l’ordinaire. Tout était taché, déchiré, cassé. Les meubles s’éparpillaient partout dans le couloir, Luka avait même du mal à avancé. Il lui fallait enjamber les chaises et les bureaux.

Luka, ressaisit toi, tout sort de l’ordinaire maintenant.

Il croyait pouvoir gérer n’importe quelle situation, mais il devait lui-même avouer que la peur commençait à le gagner. Il se sentait seul au monde, dans un monde saccagé. La porte du capitaine était juste devant lui. La vitre était complètement fissuré, mais tenait encore droite, dieu sait comment. Luka tourna doucement la poignée de la porte qui s’ouvrit dans un grincement fantomatique. Luka entra dans le bureau, qui semblait avoir été plus épargné coté rangement. Seuls les dossiers étaient éparpillés sur le sol. Le capitaine lui, était assis à son bureau, la tête penché, comme endormit.

- Capitaine, ça va ? Il faut que vous vous réveilliez, il se passe des choses pas normales.

Mais aucune réponse ne parvint aux oreilles de Luka. Il s’approcha alors en continuant de l’appeler, mais le capitaine ne semblait pas s’éveiller. Il le secoua alors avant de remarquer le sang sur la chemise de son supérieur. Il recula la chaise et découvrit l’horreur de la situation. Le corps du capitaine était éventré, laissant sortir certains organes hors de son corps.

Mais c’est affreux, qu’est ce qu’il lui est arrivé ?

Assaillit par l’odeur affreuse du cadavre lui donnant l’envie de rejeter son déjeuner, Luka recula et trébucha sur un gros dossier noir. Ses mains couvertes de sang, Luka pris ses jambes à son coup pour retourner dans son bureau, sautant par-dessus tout les meubles qui entravaient son chemin.

Il se passe quelque chose de vraiment pas normal ici

Il attrapa le téléphone de son bureau et composa le numéro de l’hôpital.

Je t’en supplie, répond, répond chérie

Aucune réponse, pas même une tonalité ni un grésillement. Le silence le plus pur, le plus affolant. Ouvrant le premier tiroir, il en sortit son arme, un glock 22 fraichement obtenu, et le plaça dans son étui, à sa ceinture.

Si tu ne réponds pas, c’est moi qui vais venir te chercher !

Luka attrapa son manteau sur le sol, sortit en courant et dévala les escaliers qui menaient au hall d’entrée.

Vite ! Vite ! Vite !

Wolf entendit les pas s’approcher. Tout au long du vaste hall voûté, la roche polie renvoya l’écho d’une course effrénée. Comme dans une église ou des thermes antiques, les murs réverbéraient le souffle de ceux qui s’y engageaient. Celui de l’homme était court, signe que la peur risquait de le gagner.
Qui d’autre qu’un policier pouvait avoir survécu ? Quelle attitude adopter, avec les forces d’un ordre abattu ?

Un inspecteur en civil, reconnaissable à son arme, dépassa le recoin sombre dans lequel Wolf s’était tapi. Il portait sur le visage les stigmates du drame, et les rides troublées d’un plus gros souci…
Sa course aurait pu s’achever là. Mais Wolf n’était pas homme à mettre une balle dans le dos.

- « Je crains que nous soyons les seuls ici. »

Il sortit des ténèbres, en conservant son arme chargée pointée vers le sol. Il ne lui faudrait qu’une fraction de seconde, si l’autre venait à dégainer…
Et pour briser la glace d’avec l’homme surpris :

- « T’aurais pas une cigarette ? »

[- « Je crains que nous soyons les seuls ici. »]

Luka sursauta lorsqu'il entendit ces mots.

Un survivant, enfin

Après tout les corps sans vie qu'il avait croisé, l'inspecteur était soulagé de voir qu'il n'était pas le seul à avoir survécu. Tout n'était peut-être pas si noir après tout. Luka se retourna alors, la surprise passée.

Qui est-ce? Un policier? Un visiteur?

Un homme sortit de l'ombre d'un recoin. Il était sale, recouvert de poussière certes, mais au moins il était vivant.

[- « T’aurais pas une cigarette ? »]

Une cigarette, il veut une cigarette ?

-Non, je ne fume pas, désolé, répondit Luka, un peu sous le choc de cette dernière question.

Ce visage ne m'est pas étranger, se pourrait-il que ce soit le prisonnier qu'ils ont capturé ce matin, Blixen.

-Mais vous allez bien ? Vous avez l'air d'avoir passé un sale quart d'heure. Vous savez ce qui c'est passé ici?

Luka remarqua alors l'arme dans la main de l'inconnu. L'inspecteur se dit que cela devait bien être le prisonnier de ce matin, Wolf Blixen. Luka n'en savait pas beaucoup à part les commerage rapportés par les autres flics.

Il a pas l'air si fou pourtant. Imprévisible, ça surement. mais avant toute chose, soyons sûr de son identité.

- Au fait, je me suis pas présenté : Luka Ever. Et vous?

‘C’est bien ma veine… Que peut-être le seul autre survivant de cette ville soit non-fumeur ! Encore une victime de la propagande hygiéniste. Un véritable fléau galopant que ces interdictions de fumer…’

- « Moi ? Ca va impec ! »

Le flic n’avait pas l’air d’avoir conscience de son propre état. Ni certain d'à qui il avait affaire.

- « Et vous pouvez m’appeler Wolf… inspecteur Ever... »

'Le bien nommé ! Espérons qu'il puisse durer toujours... Ou il n'aura jamais existé. Parce que dehors, il n'y a plus grand monde pour retenir nos noms !'

Il était passé au vouvoiement pour souligner l'ironie de la situation.
Le regard rivé dans celui de l’autre, il ne perdit rien de sa réaction mal à l’aise.

- « Quant à ce qui est arrivé… Tu as déjà vu des images d’Hiroshima ? J'ai bien peur qu’on ne trouve à l’extérieur plus d’ombres projetées sur les murs que de gens en bon état… »

Cette fois, le bleu parut fondre sur place.
... Et ses espoirs se vaporiser avec les corps de ses concitoyens !

- « Ca va être l’enfer dehors. Je crois qu’on devrait s’équiper avant de sortir. Allez... viens. »

[- « Moi ? Ca va impec ! »]

Impec, tu le dis mais t’en a pas l’air.

Tout en pensant cela, Luka regarda son propre corps. Depuis son réveil il n’avait pas pensé à voir s’il était gravement blessé. Il ne pensait plus à regarder, tellement il était habitué à la douleur. L’un des miroirs du hall lui renvoya une image de son visage blessé, dont le sang perlait encore aux coupures.

Regarde toi Luka, tu es peut-être plus propre que lui, mais question blessures, tu dois gagner haut la main.

[- « Et vous pouvez m’appeler Wolf… inspecteur Ever... »]

Inspecteur Ever, ça sonne tellement inutile dans cette situation. Mais en tout cas, c’était bien lui : Wolf Blixen.

Luka n’avait plus aucun doute certes, mais il ne savait toujours pas comment réagir devant lui. Le prisonnier était réputé dans une grande partie du pays pour différents méfaits. C’était le fait qu’il soit le plus imprévisible des individus qui inquiétait vraiment Luka.

[- « Quant à ce qui est arrivé… Tu as déjà vu des images d’Hiroshima ? J'ai bien peur qu’on ne trouve à l’extérieur plus d’ombres projetées sur les murs que de gens en bon état… »]

L’espace d’un instant, Luka perdu tout espoir en entendant ces mots. Il sentit son cœur s’arrêter, et un poids s’abattit sur lui.

Attends, Hiroshima, ce n’est pas possible. Si c’était du nucléaire, on serait tous mort. Hors, à ce que je vois, on est au moins deux à s’en être sortit. Ca veut dire que d’autres aussi. J’espère qu’ils s’en sont sortit. Mon Dieu, faite qu’ils aient survécu. Je vous en prie.

[- « Ca va être l’enfer dehors. Je crois qu’on devrait s’équiper avant de sortir.»]

Ces paroles ramenèrent Luka à la réalité.

S’équiper. Il veut que je l’amène faire son petit marché dans la réserve du commissariat. Moi, amené un prisonnier, un soi-disant fou furieux s’équiper en armes et munitions.

Pourtant, la donne avait changé. Tout était différent. Dans le monde d’avant, Luka n’aurait même pas imaginé accepté la requête de Wolf. Dans le monde d’avant, il l’aurait arrêté comme il l’aurait fait avec n’importe quel prisonnier. Mais maintenant, tout avait changé. Ce n’était plus Wolf, le prisonnier. Il était à présent Wolf, l’ancien officier des forces spéciales.

Luka, tu va devoir faire équipe avec lui pour l’instant, jusqu’à ce que tu sache ce qui c’est passé. De toute façon s’il voulait te tuer, il l’aurait déjà fait.

- D’accord Wolf. La réserve est au sous-sol. L’escalier est sur la droite. Et tu peux m’appeler Luka.

Luka ne savait pas si il avait pris la bonne décision, mais c’était la seule qu’il voyait pour l’instant.

[-« Allez... viens. »]

Luka et Wolf se dirigeait vers la double porte du hall, celle qui menait au sous-sol en passant par le couloir qui desservait les bureaux, la salle de conférence et la salle d’interrogatoire.

‘Bien. Sage décision. Ou tout au moins… pragmatique !’
Il lui emboîta le pas.

- « On va avoir besoin d’un tas de trucs. Armes, gilets, munitions… Bon, je compte pas trop sur la combinaison NBC, mais si au moins on pouvait dégoter un compteur Geiger… ça aiderait ! Déjà, on serait fixés.
Un GPS aussi. Pour voir si on peut contacter les satellites. L' effet de l'EMP va bien finir par se dissiper. Et à 20 000 kilomètres, ils ne peuvent pas avoir été affectés. »

L’ex-capitaine Blixen semblait s’accrocher à sa théorie. La plus évidente, la plus attendue.
Il fallait bien se rattacher à quelque chose. En attendant d’autres indices.

- « Et puis, il doit y avoir encore mes petits bébés, dans votre arsenal. A moins que vous ne rangiez ailleurs les pièces sous scellés… »

Ils passèrent devant la salle d’interrogatoire. La porte, hors de ses gonds, en révélait l’intérieur. Wolf se souvint avoir été dans le même état la dernière fois qu’on l’y avait traîné… Hors de ses gonds ! Il avait même cassé un ou deux nez…
C’est qu’il en avait connues, des salles semblables.
‘Visitez notre commissariat, ses cellules, ses interrogatoires, ses glaces sans tain, et ses verres d’eau qui n'arrivent jamais ! »

- « Au fait, Luka, ton chef t’aurait pas dit ce que je foutais là ? Ou à défaut, laissé des paperasses à mon sujet ? »

Dans quoi je me suis embarqué, qu'est ce qui se passe...

Ces questions assaillaient sans cesse l'esprit de Luka.

[- « On va avoir besoin d’un tas de trucs. Armes, gilets, munitions… Bon, je compte pas trop sur la combinaison NBC, mais si au moins on pouvait dégoter un compteur Geiger… ça aiderait ! Déjà, on serait fixés.Un GPS aussi. Pour voir si on peut contacter les satellites. L' effet de l'EMP va bien finir par se dissiper. Et à 20 000 kilomètres, ils ne peuvent pas avoir été affectés. »]

Wolf s'exprimait comme si il passait une liste de course. Luka avait l'impression que Wolf se trompait sur la cause de tout ce carnage, ça devait être autre chose. Mais à défaut d'avoir une théorie plus posée, il devait bien suivre Wolf.

- Il devrait y avoir armes, gilet et munitions dans la réserve. Pour le reste, je sais pas trop. Je n'y vais que très rarement.

[- « Et puis, il doit y avoir encore mes petits bébés, dans votre arsenal. A moins que vous ne rangiez ailleurs les pièces sous scellés… »]

Ses petits bébés...

Luka ne savaient pas trop de quel type d'arme il parlait, car ce devait bien être d'armes qu'il parlait. Maintenant à savoir où les flics rangeaient ça, surtout que Wolf n'avait été amené ici que ce matin, c'est une autre question.

- Je ne sais pas, répondit simplement Luka

[- « Au fait, Luka, ton chef t’aurait pas dit ce que je foutais là ? Ou à défaut, laissé des paperasses à mon sujet ? »]

- Non, je n'ai aucune idée de ce que tu fous là. Je suis dans le service enlevement et disparition. Donc j'en déduis que tu n'es ni une personne disparu, ou enlevé, ni que tu en es l'auteur. Maintenant tu crois vraiment qu'on retrouverait quoi que ce soit dans ce genre d'endroit. Les murs tiennent à peine, tout est cassé ou recouvert sous un tas de poussière.

Luka disait ça avec un grand détachement, comme si cela n'avait grande importance pour lui. Toute ses pensées allaient à ses proches, à sa famille. Il n'avait qu'une envie : préssé le pas pour aller secourir les siens. Et si cela devait s'avérer nécéssaire, s'allier avec Wolf. Luka se souvenait bien du plan du commissariat, et il remarqua qu'il était plus proche de la réserve qu'il ne l'imaginait.

-Bon, la réserve est juste derrière cette porte, dit il en désignant la porte au fond du couloir.

- « Enlèvement et disparition, hein ? Ben maintenant qu’on est tous un peu paumés, on rentre dans le cadre de ta spécialité, non ? Reste à savoir si tu as envie d’enquêter sur ton propre cas… »

Luka n’avait pas l’air tout à fait dans son assiette. On ne pouvait pas lui en vouloir. Il n’avait pas connu les champs de bataille.
Qui n’a pas vu la tête d’un ami emportée par une balle ne peut vraiment comprendre qu’on soit un autre après ça.
Comme si un peu de son humanité était restée dans le souvenir d’une détonation lointaine…

Malgré son air négligé, une main dans la poche, Wolf ressentit à cet instant le besoin d’y effleurer discrètement du doigt l’anneau d’or qu’il portait encore. Un vieux souvenir… trop vieux.
‘tout est cassé ou recouvert sous un tas de poussière, dit-il. Ouais… c’est toute l’histoire de ma vie.’

- « C’est ça la réserve ? ». En éprouvant du pied la résistance de la porte.
- « T’as la clé, ou on doit la défoncer ? »

La porte de la réserve est fermée (bien entendu).
Luka n'étant pas habilité à avoir la clef, il leur fallut d'abord dégager l'entrée, avant que l'ancien militaire ne s'acharne pour ouvrir la porte.

Une fois à l'intérieur, ils purent constater qu'une partie du matériel avait été endommagé et que la réserve n'était pas aussi pleine que Wolf l'espérait (il ne s'agit là que du matériel courant d'un policier standard ou à même d'intervenir pour de petite opération comme des manifestations)

Voici la liste de l'équipement à disposition:
- 3 Beretta 92F (pistolet semi automatique - tir simple et petites rafales de 3 balles)


- 4 Magnum 44 (gros calibre)


- 1 Fusil à pompe


- 2 Gilet pare-balles


- 2 Masque à gaz


- 1 Armure en kevlar


- 1 Tazer


- 5 Tonfa


- 5 Fumigènes et 7 lacrymogènes
- 6 Jumelles
- 2 Talkies

Pas de formule magique, ici. Juste des bons coups de lattes dans la porte. Et ils pénétrèrent dans la caverne d’Ali Baba…
Bon, ce n’était pas l’arsenal des forces spéciales. Il espérait ne pas avoir à combattre toute une armée.
Mais il y avait déjà de quoi tenir un petit siège. Pour peu qu’un groupe de fanatiques ait eu la même idée que lui… ils pourraient résister à leur assaut !

- « Vas-y. Sers toi bien. On ne pourra pas se permettre d’en laisser derrière nous. Ou alors, il faut qu’on planque ce qui reste ailleurs. »

Wolf enfila d’emblée la meilleure des protections. ‘Voilà qui devrait arrêter les plus gros calibres.’
Tout en louchant sur l’arme préférée de l’inspecteur Harry… Dirty Harry !

Apparemment, le commissariat d’Epsilon n’avait pas encore reçu en dotation les nouveaux Sig Sauer Pro 2022. Pas grave. Le matos suisse, c’était bien ; mais Wolf avait une faiblesse pour le constructeur italien. Pour le combat rapproché, il utilisait d’habitude le grand frère automatique des pistolets ici présents. Hélas, ses bébés n’étaient pas ici !

Il remplaça donc les deux vieux Manhurin par des Beretta. En holsters. Les 9 mm semi-automatiques avaient une meilleure cadence de tir.
Quant au Magnum 44… inutile de préciser qu’avec son coefficient d’impact, la victime d’un tel tir ferait un vol plané de plusieurs mètres. Avec un large trou en prime !

Puis il aperçut un fusil à pompe. Il reconnut le fameux Remington Police. ‘Tiens, un M870’.
Il chargea les sept cartouches de calibre 12 que l’arme pouvait accueillir. Et plaça les recharges dans l’emplacement prévu à cet effet. Avec une célérité impressionnante.
Il aurait pu monter et démonter chacune de ces armes les yeux fermés.

Enfin, il accrocha à sa ceinture un tazer et un tonfa. Pour les récalcitrants à garder en vie…
Et dans un grand sac, il fourra de pleines poignées de munitions, quelques grenades, un masque à gaz, une paire de jumelles, un gilet et un talkie-walkie. Il tendit le second à Luka Ever :

- « Si jamais on venait à être séparés, et que tu te sentes un peu seul… »

Luka regardait Wolf défoncer la porte à grand coup de pied. Pourtant, il semblait absent. Ses uniques pensées allant pour sa famille. Mais le fracas de la porte s'ouvrant avec violence le ramena à la réalité.

[- « Vas-y. Sers toi bien. On ne pourra pas se permettre d’en laisser derrière nous. Ou alors, il faut qu’on planque ce qui reste ailleurs. »]

La réserve n'était plus que l'ombre de ce qu'elle avait été. La plupart des armes et munitions etaient inutilisable, recouvert par un tas de gravier. Il en restait peu mais c'était toujours mieux que rien.

Luka, imitant Wolf, enfila un gilet pare-balle, s'empara d'un beretta en état de marche et le placça à sa ceinture. Puis un Magnum 44 de l'autre coté. Attrapant ensuite un sac, il y mis les deux derniers magnum qu'il restait ainsi que plusieur pack de munitions, deux donfas, quelques grenades, un masque à gaz et une paire de jumelles.

Il ne savait pas dans quoi il mettait les pieds, et il aimait être préparé pour tout les cas de figure.

Il faut que j'aille les chercher, il faut qu'ils aient survécu

[- « Si jamais on venait à être séparés, et que tu te sentes un peu seul… »]

Luka se retourna pour voir que Wolf lui tendait un Talkie-Walkie. Il tendit le bras pour le prendre :

-Pourquoi, tu as peur de te perdre?

Luka voulait détendre un peu l'atmosphère avec Wolf, le seul avec lui à avoir survécu pour l'instant.

- Bon alors, dit Luka en mettant son sac sur le dos, qu'est ce que tu fais? Moi il faut que j'aille à l'hospital, chercher quelqu'un ? Tu veux venir ? D'ailleur, il faudrait peut-être que tu soignes tes blessures, et quoi de mieux que l'hospital pour prendre du matériel médical?

- « Oh, pour cette société je suis déjà perdu depuis longtemps. », répondit-il avec un demi-sourire.

- « Oui. L’hôpital… C’est une bonne idée. On va avoir besoin de trousses de soins. Tôt ou tard. »
‘De l’iode aussi. Vite !’, pensa-t-il.
- « Et puis c’est un lieu de rassemblement. S’il y a d’autres survivants…

Par contre, je me disais, on devrait peut-être monter sur le toit pour observer l’extérieur ? Pour voir quel chemin emprunter ; au cas où des débris nous séparent de la clinique.
Ensuite, je propose qu’on cherche un véhicule. Avec un peu de chance… On y sera d’autant plus vite. Qu’est-ce t’en penses ? »

[ « Oui. L’hôpital… C’est une bonne idée. On va avoir besoin de trousses de soins. Tôt ou tard. »
- « Et puis c’est un lieu de rassemblement. S’il y a d’autres survivants…]

des survivants, j'espère que tu dis vrai Wolf
C'était tout de même un soulagement pour Luka que Wolf daigne l'accompagner. Il y serait aller bien sur, mais tout seul, avec une jambe en moins, mais il se disait qu'avec Wolf, ce serait plus simple. D'un geste du doigt, il fit tourner l'alliance qu'il avait autour du doigt, priant de toutes ses forces qu'ils aient survécu. Il ne pouvait concevoir le contraire.

[Par contre, je me disais, on devrait peut-être monter sur le toit pour observer l’extérieur ? Pour voir quel chemin emprunter ; au cas où des débris nous séparent de la clinique]

- Tu as raison, répondit simplement Luka

[Ensuite, je propose qu’on cherche un véhicule. Avec un peu de chance… On y sera d’autant plus vite. Qu’est-ce t’en penses ? »]

- Ben il doit y avoir un tas de voitures dans le parking, la mienne y compris. Mais si tu veux mon avis, faut pas trop compté la dessus. Elles doivent être enfoui sous les gravas. Mais restons positifs.
Si je me souviens bien, l'escalier nord monte directement au toit. En suivant ce couloir, on y sera en un rien de temps.

A ces mots, il regarda Wolf, mis son sac d'armes sur le dos et s'engoufra dans le couloir. Les dernières lueurs du crépuscule penetrait par la grande baie vitré Alors que Luka et Wolf courait en direction du nord pour rejoindre l'escalier. Quelques corps jonchaient le sol, caché par les meubles en vrac. Ils arrivèrent, au bout de quelques minutes devant la double porte des escalier. Luka posa la main sur la poigné, et la porte s'ouvrit alors.

Wolf prit sa suite et, tout en grimpant l’escalier nord :

- « Au fait, elle sont récentes vos caisses ? Parce que… si Epsilon a eu droit au premier attentat nucléaire de l’Histoire, le blast électromagnétique a du griller la plupart des circuits. Plus de portables, plus d’ordinateurs - et plus de voitures. A moins de trouver un modèle ancien, qui ne repose pas sur l’électronique pour l’allumage et l’injection... Une vieille tire, quoi ! »

Ils parvinrent rapidement au sommet. Le risque de sortir n’était pas négligeable. La radioactivité devait être forte. Même si toute protection était dérisoire à long terme, cela offrait au moins une meilleure chance de survie immédiate.

- « J’ai une meilleure armure. La logique voudrait que j’aille voir d’abord si c’est vivable…
En cas d’attaque bactériologique. Si je reviens pas dans cinq minutes, tu sauras à quoi t’en tenir ! »

Il se couvrit bien les bras et, en attendant de trouver des gants, il pourrait toujours garder ses mains dans les poches.
Pour les radiations… il ne le saurait que trop tard.

[- « Au fait, elle sont récentes vos caisses ? Parce que… si Epsilon a eu droit au premier attentat nucléaire de l’Histoire, le blast électromagnétique a du griller la plupart des circuits. Plus de portables, plus d’ordinateurs - et plus de voitures. A moins de trouver un modèle ancien, qui ne repose pas sur l’électronique pour l’allumage et l’injection... Une vieille tire, quoi ! »]

- Je ne sais pas, je ne suis vraiment pas calé en voiture.

C'était vrai, Luka n'avait jamais eu d'interêt pour les voitures, tant qu'elles fonctionnaient, c'était le plus important. Et plus ils gravissaient les marches, plus Luka redoutait le moment où ils allaient découvrir l'étendu des dégats. Il fallait garder espoir. La porte du toit se dressait là, devant eux.

[- « J’ai une meilleure armure. La logique voudrait que j’aille voir d’abord si c’est vivable…En cas d’attaque bactériologique. Si je reviens pas dans cinq minutes, tu sauras à quoi t’en tenir ! »]

La logique, la logique, il doit pas savoir que je ne pourrais pas attendre une seconde de plus

- La logique n'est pas de mise ici, on sort ensemble. De toute façon, si c'est pas viable...

Luka ne voulait pas finir sa phrase, il ne voulait pas imaginer qu'ils n'avaient pas survécu, autant mourir aussi.

- Met ton masque à gaz, on sait jamais

Ces mots semblait ironique pour Luka. Il enfila le sien, et se décida à ouvrir la porte. Il tourna lentement la poigné, entrouvrit légèrement le battant. Une douce brise penetra le couloir, une brise tiède qui s'infiltra sous leurs vetements.

Wolf enfila son masque. Il avait déjà chaud et respirait avec difficulté. Engoncé dans son armure, il ne voyait plus que la porte devant lui.
Derrière, qui pouvait dire ce qui s’y trouvait ? A quel état la ville avait-elle été réduite ? N’était-ce plus qu’un squelette vide livré aux flammes de l’enfer ?

Il prit une bonne inspiration et se résolut enfin à pousser le battant qui le séparait du toit.
Il s’attendait au pire et n’allait pas être déçu.

Une lueur diffuse vint les frapper. Un crépuscule brumeux déposait une fine pluie de particules noires. Le soleil affaibli avait de nouveau disparu, sous un voile opaque de poussière… organique ?
L’homme en armure fit quelques pas erratiques sur le sol arasé. Un violent souffle en avait lissé la surface. Les vestiges d’antennes arrachées s’étaient répandus en flaques de métal ; et le toit par endroits s’était soudain vitrifié.

Face à lui les faubourgs, plongés dans le soir ; paysage de toitures éventrées, à la lueur dansante de foyers isolés. Ca et là pourtant, le feu avait épargné le quartier.

Puis il se retourna…

« Et le Loup se dressera seul face au Seigneur des Cieux. »

Wolf se tenait là, au sommet du bâtiment de pierre, fixant bien droit l’abîme dans les yeux.
Une menaçante colonne de fumerolles sombres occupait désormais le cœur de la cité !
Elle culminait bien haut ; et l’au-delà demeurait invisible. Perdu pour les hommes.

Aux pieds de ce ténébreux titan, la ville entière avait ployé l’échine.
De vastes immeubles maintenaient à grand peine leur carcasse enflammée. D’autres majestueux édifices chancelaient sous le poids de leurs ruines. Dire qu’ils abritèrent des sociétés et des marques si respectables jadis !
Ailleurs, les sièges de nobles institutions avaient été décapités. Et parmi eux, dans l’entrelacs des bâtisses à l’agonie, gisaient pêle-mêle ceux dont ils s’étaient joués ; hommes et voitures, irrémédiablement mêlés.
Un crépuscule de poussière et de sang !

Le soleil émane de l’épée du dieu des morts ;
Les rocs s’entrechoquent, les monstres s’ébranlent,
Les hommes foulent le chemin d’enfer ; et le ciel se crevasse.

Luka sortit sur le toit à la suite de Wolf. Tout était calme, d'un calme affreux. Il n'y avait qu'un silence pesant qui s'était installé sur Epsilon. Plus aucun des bruits habituels des grandes villes n'étaient audible.
Il fit plusieurs pas sur le toit poussiereux, observant la fine pluie de ce qui semblait être des cendres.
Luka regarda d'abord en direction du centre ville qui se dressait devant lui, où un épais nuage noir couvrait les batiments. Impossible de savoir ce qui se passait là-bas.
Se retournant alors, il fixa l'horizon en direction de l'hospital. Le ciel semblait clair là-bas, à part de petite fumée qui s'élevait lentement.

- C'est la-bas qu'il faut que j'aille tout d'abord, dit-il en désignant l'hospital qu'on voyait à peine.

Je vous en prie, soyez encore vivant, pour l'amour de Dieu, qu'ils soient encore vivant.

Ses pires craintes s’étaient vues confirmées. C’était bien un squelette vide livré aux flammes de l’enfer !
Saisi par cette vision d’apocalypse, Wolf fut plus surpris encore par l’optimisme de Luka.

Parce qu’il y avait quelque chose qui clochait. Les dégâts étaient bien compatibles avec ceux d’une bombe atomique. Sauf que l’explosion avait manifestement eu lieu au sol. Il ne pouvait donc s’agir d’une attaque nucléaire ‘classique’. Les autres puissances nucléaires disposaient toutes de lanceurs. Et l’on faisait toujours exploser la bombe en altitude, pour maximiser les dommages et l’effet de paralysie induit par l’EMP.
Cela renforçait plutôt son hypothèse d’attentat terroriste. Nombre d’ogives avaient disparues de l’Union Soviétique en déliquescence.
Pourtant, un élément essentiel ne collait pas. La mortalité.
Contrairement aux idées reçues, il y avait bien plus de morts par les retombées radioactives que par l’explosion elle-même. Enfin, selon les modèles de prévision…
Soit les gens étaient instantanément vaporisés par la chaleur, soit ils agonisaient lentement, brûlés à petit feu par les radiations !
Et là, les rues se couvraient de corps mutilés.
Bon, ils étaient très proches de Ground Zero, mais plus loin ?
On aurait du voir des êtres hagards s’extraire des décombres, d’interminables files de brûlés et de blessés… promis à un funeste destin.
Que n’auraient-ils donné pour juste entendre le bruit lointain d’un exode humain.
Mais rien.
Ils étaient seuls dans une ville annihilée.

Le taux de mortalité dans le commissariat lui avait un instant fait craindre une attaque bactériologique. Cependant, stratégiquement, on ne couplait jamais une offensive virale – qui demande une forte concentration de population pour être efficace – à une attaque nucléaire, qui laisse déjà peu de chances aux survivants.

Parmi les armes connues, il n’en restait plus qu’une : la bombe à neutrons !
Si elle pouvait effectivement provoquer de tels dégâts humains, c’était cette fois les dommages matériels qui ne collaient plus. Dans ce cas, il n’ aurait pas du y avoir plus d’un ou deux pâtés de maison de détruits.
Sans compter que rares étaient ceux à en disposer. Et dans le contexte politique actuel, les Etats-Unis n’avaient a priori aucune raison de détruire Epsilon !

Alors quoi ?

Interrompu dans ses réflexions militaires par le geste de Luka, Wolf tenta d’apercevoir l’hôpital dans les brumes de la nuit tombante. Mentalement, il repéra le plus court chemin praticable.
Que lui dire ? Que sa chance de retrouver des proches en vie était infime ? Qu’il aurait mieux valu s’épargner la douleur de découvrir le corps d’un ami, ou pire, d’un amour ? Que la plupart des cadavres étaient méconnaissables, ou enfouis ? Enfin, que les plus chanceux s’étaient sûrement déjà enfuis !
Non. Parce qu’il fallait couper court à cette vision d‘horreur, parce que l’espoir de ne pas être resté seul semblait porter le jeune policier, Wolf lui mit une main sur l’épaule et, le souffle court, la voix déformée par le masque à gaz, lui dit :
- « Luka… je suis ton père ! »

Il n'avait pas pu résister...

Luka cherchait encore et toujours le moyen d'arriver à l'hospital le plus vite. Certaines rues étaient barré par des tas de voitures et des garvas. D'autres étaient coupés par l'éboulement de maison. Un univers apocalyptique tel qu'il n'en connaissait que dans les films s'étentdait devant ses yeux. Et plus il détaillait l'horizon, plus il doutait des chances de retrouver quelqu'un en vie.

Aie confiance, garde espoir. Tu es vivant, et wolf aussi. Alors pourquoi pas d'autres...

Luka sentit alors la main de wolf se poser sur son épaule. Il pensait sans doute que Wolf eprouvait un peu de compassion pour lui. Après tout, Blixen était célèbre.

[- « Luka… je suis ton père ! »]

L'inspecteur tomba des nues quand il entendit ces mots. Mais à quoi s'attendait-il de la part de Wolf? un mot gentil? une marque d'empathie.

- Non, c'est vrai... ben dis donc, quelle nouvelle, dit-il dans un sourire

Luka ne s'était pas rendu compte de suite, mais l'espace d'un instant, une infime seconde, il avait oublié l'horreur qui se dessinait sous ses yeux. Mais revenant plus vite qu'un cheval au galop, Luka reprit.

- C'est bon, tu as bien admiré la vue, on peut partir maintenant. Il faut qu'on se dépêche.

Son soulagement n'avait durer qu'une infime seconde, avant que son serieux et son inquiétude ne reviennent. Il se dirigea vers la porte du toit, d'un pas pressé.

-Allez, passons au parking voir si ma caisse marche encore, dit-il sans se retourner, en sortant les clés de sa poche.
Avant de rentrer dans l'escalier, Luka retira son masque et prit une grande bouffé d'air. Il était frais, et lui procura un bien fou. Il avait mesuré la porté de son geste, mais c'était pour lui, une manière de se convaincre qu'on pouvait survivre sans masque dans cette ville. il devait se raccrocher à quelque chose, pour ne pas s'éffondrer.

- L'air est frais, dit-il en direction de Wolf

Il regarda Luka d’un œil inquisiteur, juste quelques secondes, au cas où il prendrait soudain un air de poisson pas frais… On n’était jamais trop prudent.
Puis il le suivit dans sa descente, en enlevant le sien.

- « Tu sais… cette excursion n’aura pas été totalement inutile. On sait maintenant quels bâtiments sont encore debout. Et que cette explosion ne correspond à aucun schéma connu. »

Il lui fit part de ses réflexions sur les armes de destruction massive, et leurs conséquences.

- « La bonne nouvelle, c’est qu’il y a moins de chances qu’on meurt d’ici quelques heures d’irradiation. La mauvaise, c’est qu’a priori personne n’a jamais eu à faire face à ce qui vient d’arriver… Pas de parade connue, donc. Ni plan d’intervention d’urgence.
Et qu’est-ce qui reste ? La chute d’un petit astéroïde – quelques centaines de mètres grand maximum ? Ou une expérience scientifique qui aurait mal tourné ? Sur la fusion ? »

Wolf pouvait imaginer des évènements plus extravagants encore ; mais mieux valait les garder pour lui dans l’immédiat.

Ils atteignirent le parking. Ce n’était pas reluisant. Trouver un véhicule en état de marche allait relever de la gageure…

Luka n'écoutait qu'à moitié les explications de Wolf. Chacune pesait sur son espoir, le forçant à reconnaitre le peu de chance de survie. Mais il devait garder espoir, sinon, jamais il ne pourrait tenir, pas même un pas de plus.

["Ou une expérience scientifique qui aurait mal tourné ?"]

Plus wolf parlait, plus Luka avait l'impression de se retrouver dans un film, dans un jeu video, ou tout autre scénario tiré de l'imagination débordante d'un auteur à frisson.

Une experience scientifique, et on va tous se transformer en zombie qui mange de la cervelle

Le parking était l'endroit où regnait le plus de chaos dans le commissariat. Jamais il ne trouverait une voiture en état de marche. Luka sortit ses clés, et appuya sur le bouton d'ouverture. Un bip-bip sortit de sous un tas de décombre, avant de mourir d'agonie.

- Je crois bien que ma voiture vient de décédé..., ironisa-t-il

Il regarda dans plusieurs autres caisses, mais aucune ne démarrais. Les pare-brise étaient inexistant, et celle qui n'était pas enfoui sous un tas de gravat, semblait avoir eu le moteur éventré. Des gerbes d'étincelles sortait de partout.

- Si tu veux mon avis, vaudrait mieux qu'on y aille à pied, c'est moins risqué...

Luka se dirigea vers l'entrée du parking, d(où provenait un courant d'air frais. La vision des rues était bien différente de celle qu'il avait eu sur le toit. Désolation, partout, chaos en tout lieu. Et personne, personne dans son champs de vision, où qu'il regarde. Pourtant, à 10 m de là, il vit une ambulance couché sur le coté.

-Tiens, une ambulance, on pourrait peut-être trouvé de quoi soigner nos blessure... Allez, viens on va voir.

Cassie émergea péniblement de sous un bric-à-brac dont elle ne savait pas nommer la moitié. Elle était libre et écorchée de partout, ça faisait mal aussi mais elle serra courageusement les dents pour inspecter sa situation de ses grands yeux.

A priori elle était toujours coincée de cette ambulance mais rien ne l'empêchait de s'enfuir. La porte défoncée était grande ouverte et Cassie pouvait sentir le vent lui caresser le visage. Elle aimait ça, la liberté l'attendait et aucun vilain monsieur en blanc n'était là pour la contraindre à rester. Elle se dépêtra tant bien que mal du fourbi d'ustensiles médicaux et jeta un oeil par la lucarne donnant sur le chauffeur. Il était gentil lui, il lui avait souri lorsque le docteur l'avait amené de force dans l'ambulance. Il n'avait pas l'air d'aimer ça mais lui non plus n'avait pas eut le choix, il devait le faire et c'était tout. Dommage que ses jambes et son bassin soient réduits en bouilli indéfinissable et que sa tête formait un angle bizarre avec le reste du corps. Elle lui aurait bien parlé, puis c'était un peu grâce à lui qu'elle était libre, s'il avait été meilleur conducteur, ils n'auraient pas fini sens dessus dessous. Elle chassa l'odeur incommodante qu'il dégageait d'un revers de main inutile.

- Bonne nuit monsieur, je ne vous oublierai pas vous non plus. Merci.

Elle marcha sans un regard sur le vilain docteur surveillant en parti enseveli par les objets qu'elle avait elle-même retiré pour sortir du véhicule. Celui-ci était sur le toit et comme elle se doutait dans un piteux état. Cassie se demanda l'espace d'une seconde ce qui avait bien pu être la cause de cet accident et de sa perte de connaissance avant de découvrir stupéfaite le décor d'apocalypse qui s'offrait à elle.

- Ouaaah... pire que la chambre d'Alice ! Ais-je dormi tout ce temps ?

Cassie n'avait pas vu ce qui c'était passé sanglée étroitement sur son lit mais elle se souvenait parfaitement que ce n'était pas comme ça à l'hôpital, elle en était certaine. Sa tête devait avoir durement cogné pour ne pas se rendre compte de tout ce chamboulement. Elle avait beau tourner la tête dans tous les sens, aucun bâtiment n'était épargné donc aucune raison pour que l'hôpital le soit. Cassie sourit, cela signifiait-il que tous les méchants docteurs étaient morts ? Jess aussi ? Non... Il y avait trop de cadavres pour que ce soit le verdict d'un juste châtiment et elle se refusa à croire que l'humanité était si mauvaise. Ce devait être autre chose bien qu'elle n'en avait aucune idée. Elle voulu s'avancer mais à garder le nez en l'air, elle mit le pied sur un débris de tôle particulièrement aigu.

- Aïe !

Elle avisa ses pieds nues et sa petite robe d'hôpital la protégeant à peine du froid. Elle avait besoin de chaussures sinon elle ne pourrait plus marcher après et de quoi se vêtir correctement contre le vent fripon s'infiltrant sous ses habits. Elle regarda autour d'elle avec moins d'émerveillement et plus d'attention. Beaucoup de morts trop grands pour elle et de véhicules en ruines mais aucune paire de chaussures convenable à l'horizon. Il faut dire que devant le commissariat ce n'était pas le meilleur point de vente, les messieurs dedans ne comprenaient rien à rien et fallait toujours leur expliquer des dizaines de fois les choses pour que enfin ils se décident à griffonner vos déclarations. Et ce n'était pas tout, en plus de leurs têtes de mules, ils faisaient encore plus souvent la leçon que papa et maman. Cassie ne les aimait pas beaucoup car pour couronner le tout, elle les soupçonnait d'être de mèche avec les docteurs bien qu'ils l'avaient toujours traités correctement.

Deux hommes s'approchèrent de derrière le bâtiment et Cassie ne perdit pas de temps pour filer comme une flèche se cacher. Ses pieds nues sur l'asphalte ne laissaient échapper aucun bruit. Elle ne voulait pas se faire prendre, à ça non ! Elle attendit le cœur battant la chamade à l'abri de l'ambulance que les messieurs bizarres s'en aillent pour remontrer le bout de son nez. C'était la seule planque qu'elle avait trouvé à proximité, pour un retour à la liberté, elle n'était pas allé bien loin de sa cage.